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please kill me
25 mai 2007

la nuit nous appartient

C'est bientôt la fin de cette semaine cannoise. Demain, je fais ma valise et je me prépare psychologiquement à 6h de train bondé, dans la chaleur et la fatigue.
Cette année fut encore riche en belles surprises cinématographiques. Mis à part le Ferrara et le James Gray, tous deux, dans des genres très différents, c'est plutôt depuis le cinéma français que mes plaisirs de spectateur furent comblés. Deux films à part, étonnants et stimulants, confirment les talents de réalisateurs singuliers.
"La France" de Serge Bozon propose un lent road-movie pédestre teinté d'une humanité et d'une singularité nécessaire dans un paysage cinématographique français devenu tellement timoré. Là, il ose non seulement un casting hétéroclyte parfait mêlant sa bande de potes déjà vue dans "Mods" avec des comédiens plus confirmés tels que Guillaume Depardieu, Pascal Gregory, Jean-christophe Bouvet et Sylvie Testud. La mayonnaise prend parfaitement, non seulement grace à une direction d'acteurs hors pairs mais aussi et surtout grace à la confiance dans la mise en scene et l'écriture. Les plans sont d'une simple beauté, trouvant leur juste durée pour que l'on soit en permanence éveillé au film. C'est également ce que je pourrai dire du second film français qui me toucha profondemment cette année. "Avant que j'oublie" de Jacques Nolot prouve qu'il est simple de faire un pur bloc d'emotion et de plaisir avec presque rien, simplement des dialogues parfaitements écrits et interprétés. Le film, d'une noirceur terrifiante, vecteur d'une angoisse diffuse constante, demeure pourtant, grace simplement à la franchise de son ton, totalement supportable. L'humour désenchanté place le film sur un précipice dangeureux, entre l'auto-complaisance, l'auto-apitoiement dans lequel jamais il ne sombre et une dérision sur soi-même salutaire. Car rien n'est particulièrement réjouissant dans la vie d'un homosexuel vieillisant, séropositif, et pourtant, l'appétit sexuel ne tombe pas, malgré les cachets, malgré la tristesse, la vie est là, bien présente, permettant au protagoniste de trouver, dans ses rapports aux autres, à ses amis, ses amants, ses souvenirs, une place bien à lui, une place au monde. Et travesti, fumant cigarette sur cigarette, il peut du haut de ses talons, s'engouffrer dans l'obscurité d'un cinéma porno, pour s'évanouir à la vie, presque paisiblement. Mais de ce désenchantement, je suis ressorti vigoré, stimulé par tant de simplicité et d'élégance cinématographique.

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Mais Cannes, ce n'est pas que des bons films, c'est aussi quelques fêtes prodigieusement vulgaires mais auxquelles une irrépressible envie d'en étre me saisie. Par exemple, après avoir vu le sublime Go Go Tales de Ferrara, j'entends dire que le cabaret de strip tease  du film avait été reconstitué dans une villa. Vaille que vaille, je veux voir ça et je trouve l'énergie, bien qu'il est déjà 3h du matin et que la fête se situe à 20 minutes en car de Cannes, à y aller. Je tape un petit rail histoire de retrouver la pêche et me voilà parti ! Et là, c'est juste dingue, un monde de fou, vodka tonic sur vodka tonic, retrouvailles avec les amis, plusieurs lignes plus tard, je découvre la reconstitution du cabaret. Je suis déçu, c'était de la publicité mensongère, car en fait il s'agit d'un bassin à mousse noblement appelé "Fishing the bimbo" où visiblement (mais je suis arrivé trop tard) de jeunes et dénudées filles se faisaient pêcher par de musculeux danseurs. Non loin de cette activité hautement intellectuelle, sous une tonnelle éclairée de spots rouges du meilleur effet, 5 ou 6 chaises attendaient que des hommes moins timides que moi s'asseyent afin que de somptueuses strip-teaseuse leur prodiguent d'excitantes lap-dances sous les regards envieux et concupiscents de ceux qui n'avaient finalement pas osé s'assoir.

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Pour ma part, j'ai préféré l'atelier dope que quelques amis et moi avions installé dans un coin du parc, un peu à l'écart. Là, plusieurs grammes d'une coke assez moyenne finirent dans plusieurs narines, plus ou moins jolies. A peu près toutes les demi-heures, nous nous retrouvions à cet atelier. Et ce, entre 4h et 7h du matin, je vous laisse faire donc les comptes. Pendant ce temps, Asia Argento mixait et mettait les Dead Kennedy's.

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Le retour en navette fut comme il se doit assez rigolo, les gens, se battant littéralement afin de quitter cette villa, tout comme ils s'étaient battus pour y entrer.
Ce matin, par chance j'ai eu la possibilité de voir le film qui avait à lui tout seul justifié ma présence à Cannes. J'attendais le James Gray avec impatience et cette attente n'altéra en rien mon plaisir à sa vision. La tragédie familiale, thème cher à James Gray est le noyau de "We own the night" (sublime titre, devise des flics newyorkais). Encore une fois, des comédiens impressionnants et une mise en scène d'un classicisme qu'il fait bon retrouver. C'est sans doute avec le Ferrara MON film du festival.
Ensuite, le très attendu Breillat, qui pour une fois, ne la ramène pas trop et semble s'appliquer à servir une adaptation fidèle de Barbey d'Aurevilly. Asia est belle, le jeune comédien aussi, par contre, en sortant du James Gray, on mesure facilement le décalage entre une mise en scène ORTF et le vrai talent cinématographique.
Ce soir, c'est la fête de clôture de la Quinzaine des Réalisateurs. Chaque année, c'est une fête plutôt sympathique où on s'amuse plutôt bien. Je vais m'y employer.

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Commentaires
L
Liulee> Oui, on ne s'ennuyait pas cette année à Cannes. Pas mal de fêtes et une petite quinzaine de films...<br /> Lidell> Pour le Bozon, ça ne devrait pas faire de problème, je pense qu'il aura une belle sortie, quant au Nolot, j'espère qu'il aura la chance d'être un peu vu, mais c'est pas gagné...
L
Je regrette vraiment de ne pas avoir été à Cannes cette année. Merci pour ce compte rendu, j'ai vraiment hâte de voir les films cités (tant le Bozon que le Nolot !).
L
Hé jolie description de la faune et de la flore cannoise sous influence:)<br /> Take care:))<br /> The Liu)
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